Le retrait de Gaza a laissé des cicatrices dans les âmes des adolescents. C’était une après midi brûlante de l’été 2007, quelques deux ans après le retrait de Gaza, sur les pelouses du kibboutz religieux de Hefetz Haim, près d’Ashkelon. Je prépare un papier sur le monde religieux après le retrait de Gaza. Pas un papier politique. Je laisse de coté la controverse politique sur le bien fondé ou non de la politique d’Ariel Sharon pour raconter la détresse personnelle, l’histoire d’hommes, de femmes et d’enfants bousculés par les courants de l’histoire.
Ils ont entre 17, 18, 19 ans. Il y a deux ans ils habitaient le Goush Katif. Ils sont assis en rond sur les pelouses du kibboutz et tentent de comprendre. Voici quelques propos que j’ai alors notés:
Noam : « Je devais entrer dans l’armée, dans quelques mois. Je ne peux plus aujourd’hui, je ne me vois pas servir dans une armée qui a expulsé ma famille de sa maison. Je me sens humilié, trahi, jeté aux loups, rejeté par mon armée, par mon pays. «
Dan : « Tsahal et nous, c’est fini. Je réfléchis depuis quelques jours et j’ai décidé d’entrer dans une yéshiva pour étudier la Tora, au lieu de servir dans Tsahal. Moi qui étais un fervent de l’Etat d’Israël, du sionisme, je ne me reconnais plus aujourd’hui face à ces valeurs et je me demande si le judaïsme orthodoxe n’est pas plus honnête. L’Etat d’Israël, s’il n’est plus respectueux d’Eretz Israël, de la terre d’Israël doit perdre sa centralité. Comme disent les orthodoxes, comme le pensent beaucoup de juifs en Diaspora, on peut être juif, sans Israël. « Et de sortir de sa poche une kippa noire en enlevant la kippa aux couleurs orange et verte.
Rami : « Tu vas quand même un peu loin. Au lieu de tout briser, nous devons nous poser des questions. Pourquoi notre combat a t-il échoué, pourquoi n’avons nous pas réussi à convaincre le public et les leaders politiques.
Nissim : « Depuis la création de l’Etat d’Israël, nous avons vécu comme dans un ghetto au sein de la société israélienne. Des écoles séparées, un mouvement de jeunesse, des quartiers d’habitation à nous, et surtout une appropriation du « grand Israël « , comme si vivre à Ariel ou dans le Goush Katif était plus sioniste que de travailler à Tel-Aviv ou de cultiver la terre du Néguev. «