Charansky il y 25 ans

Il y a 25 ans, Anatoly Nathan Charansky arrivait à l’aéroport Ben Gourion. Après 9 ans dans les prisons du goulag soviétique, 400 jours de cachot, de froid, de faim, après dix ans de manifestations à travers le monde, celui qui était devenu le symbole de la lutte obstinée de l’homme juif pour la liberté, arrivait en Israël. C’était le 11 février 1986 et Israël était alors en liesse.

Empêtré dans le quotidien et les scandales souvent peu glorieux de l’Etat d’Israël de 2011, j’ai pensé qu’il fallait parfois se rappeler ces dates historiques pour ne pas oublier notre raison d’être sur cette terre.  

Quelques semaines après son arrivée en Israël, nous avions invité Charansky pour une émission spéciale. ( Sur la photo, à la sortie du studio de la radio à Jérusalem avec Tal et mes parents, qui étaient venus spécialement pour serrer la main à Charansky).                                    

Tal avait trois ans, et Nathan Charansky en la regardant, m’avait dit, “ Moi aussi j’aurai bientôt un bébé. Israël, c’est d’abord le droit à la normalité.”

 

Crédit Photos   Naty Hernik – Governement Press Office

  • Charansky accueilli par Shimon Pérés Premier ministre du gouvernement d’union national et Itshak Shamir, ministre des affaires étrangères
  • Charansky et sa femme Avital
  • Charansky et Ariel Sharon, ministre dans le gouvernement Pérés-Shamir 

Le bébé de Suleiman

Douleurs d’accouchement, pluies diluviennes, aucune ambulance n’arrive à atteindre la maison isolée de Suleiman*, une palestinienne de 27 ans, habitant une région isolée, en amont de la vallée du Jourdain. Son mari descend alors sur la route voisine, contrôlée par l’armée israélienne, arrête une patrouille et explique le drame. L’officier n’hésite pas, envoie une ambulance militaire. Dans l’ambulance, le bébé lui n’attend pas et les soldats mettent au monde, sous la pluie battante et les orages quelque part entre Jéricho et Jérusalem le bébé de Suleiman. Le sergent Guilad, s’aperçoit que le bébé a des défaillances respiratoires. L’unité de secours aéroportée, la célèbre unité 669 est dépêchée et quelques minutes plus tard, le bébé et sa maman arrivent à l’hôpital

Ce matin, à la maternité de l’hôpital Hadassah Ein Kerem, Suleiman, son bébé dans ses bras a dit: ”Je vais raconter cette histoire. Les soldats israéliens ont sauvé ma vie et celle de mon bébé. Ce ne sont pas les soldats sanguinaires que j’ai vu dans un film de Al Jazira.” 

 Et je commente. La petite phrase de Suleiman fera t-elle le tour du monde, où restera t-elle le privilège des lecteurs de mon blog ?

*Nom d’emprunt. Lorsque j’ai raconté cette histoire ce matin sur Radio J, j’ai cité le nom exact de la palestinienne, on m’a fait comprendre ensuite, qu’il valait mieux ne pas révéler son identité. Les belles histoires n’étant pas vraiment appréciées dans certains milieux palestiniens.

Photo: Porte parole de Tsahal, le sergent Guilad qui a mis au monde le bébé dans l’ambulance.

Les derniers des Falashmuras

 Dans le cadre d’une enquête que je mène depuis quelques semaines sur l’arrivée en Israël des 8000 “derniers” Falashmuras, nous avons rencontré le Rav Yossef Hadane, le chef spirituel de la communauté juive éthiopienne en Israël. ( Nous, Michaël a rencontré pendant des heures et des heures et j’ai mis en page l’entretien)

Voici pour vous, lecteurs de mon Blog, quelques uns de ces propos nouveaux ou/et  importants.

 Sur son arrivée en Israël en 1972

Cela n’a pas été simple  du tout. Il m’a fallu des mois pour créer des liens avec les Israéliens. La plupart me regardait avec suspicion. Un rabbin noir…

Sur le Rabbin Ovadia Yossef

J’ai rencontré pour la première fois, le Rav Ovadia Yossef en 1972. Il était alors le Grand rabbin de Tel Aviv. Un an plus tard, Grand rabbin d’Israël, il décrète que les Beta Israël sont  Juifs. Sans cette décision, il n’y aurait peut-être pas d’Ethiopiens en Israël aujourd’hui. Plus tard, il m’a raconté que sa décision s’est fondée sur le jugement du Radbaz, un sage de l’époque du  Moyen Age qui avait du légiférer sur la validité d’un mariage entre un juif habitant la région tunisienne et une femme des Beta Israël. Le Radbaz avait tranché. Cette femme  éthiopienne, noire était juive.

Sur l’origine des Beta Israël

Il existe plusieurs thèses, toutes  se perdent dans la nuit des temps. Le roi Salomon, la reine de Saba. Je ne pense pas. La thèse la plus sérieuse, qui a toujours été la notre et qui a été adoptée par le rabbinat d’Israël.  Nos ancêtres  seraient les exilés du royaume du Nord d’Israël, de la tribu de Dan, au moment de chute de Samarie en 722 av. JC. Nous serions donc une des tribus juives perdues.

 Sur le roi Guidon et la Shoa éthiopienne

Nous avons eu des royaumes juifs indépendants et notamment  la période glorieuse du Royaume du roi Guidon au 17è siècle. Nous avons ensuite été vaincus. Chez nous, nous parlons de cette période comme une sorte de Shoa. Sur un demi million, seuls  100 000 survécurent. Cette défaite marque en fait la fin de l’autonomie des juifs en Ethiopie et le début d’un asservissement souvent effroyable.

Sur le mot Falashas

Pour la population locale, nous étions des Falashas. Falashas, signifie étrangers Pour les habitants de cette région du monde nous étions des “envahisseurs”, nous avions envahi l’Ethiopie,   Mais dans notre tradition, nous nous dénommons Béta Israël, la maison d’Israël.

Sur les Falashmuras.

Les Falashmuras ont embrassé le christianisme éthiopien, sous la contrainte. A partir du 18e siècle et surtout au 19e siècle. Les Beta Israël les ont alors dénommés,  “Falashas traîtes”, Falashas renégats”, d’où l’expression de Falashas Mura. Ensuite, ils ont été rejetés par ces chrétiens. Ni juifs, ni vraiment chrétiens, mais ils ont jalousement conservé leur identité. Par exemple, ils ne contractaient  pas de mariage exogame et choisissaient leur conjoint dans la  communauté falashmura.

Sur la décision de permettre leur arrivée en Israël

Certains de notre communauté ont eu des doutes sur le bien fondé d’une telle décision. Pour moi, il n’y aucun doute. Il faut les faire venir en Israël, c’est leur seule issue. De tout temps, ils ont exprimé leur désir de revenir au judaïsme. Nous avons là un devoir moral, historique. Même si il est exact qu’aujourd’hui beaucoup sont très éloignés du judaïsme.

8000 aujourd’hui et si demain d’autres milliers veulent immigrer

Il est exact qu’il existe en Ethiopie, de nombreux groupes qui affirment que dans un passé lointain, parfois plusieurs siècles, leurs ancêtres avaient un lien avec le peuple juif. Il existe de nombreux motifs juifs dans cette région du monde. Mais le gouvernement a pris une décision très claire. Il y a quatre critères. Un, du « sang juif » du coté maternel. Deux, une  volonté exprimée de retour au judaïsme. Trois, être inscrits sur la liste d’attente dans le camp de  Gondar. Quatre, des parents en Israël. Tout ceci pour éviter les abus.