Une nouvelle histoire de guet à succès

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Esther (nom d’emprunt), originaire de la ville de Lyon a eu son guet aujourd’hui, au Tribunal rabbinique d’Ashkelon, quatorze ans (!!!) après avoir divorcée  civilement. Pourquoi tellement d’années, pourquoi ce succès aujourd’hui ?

La première raison : Une femme qui après des années de souffrance, d’hésitation, de va-et-vient, de scrupules, de tergiversations, d’erreurs aussi, décide de lutter jusqu’au bout, de prendre son destin en main et choisis d’appliquer la formule des battantes : “Je Veux, J’Agis”.

Cela semble évident. Et pourtant, nous avons plusieurs dizaines de dossiers de femmes qui ont fait un tout premier pas, se sont adressés à nous, au Tribunal rabbinique, puis par crainte ont gelé leur démarche et sont restées prisonnières de leur destin.

La seconde raison à mon avis, est liée à une coopération étroite entre les tribunaux rabbiniques locaux, en l’occurrence, le tribunal de Lyon et les tribunaux rabbiniques israéliens. Dans plusieurs affaires que nous avons traitées avec succès ces derniers mois, c’est ce dialogue qui a permis de débuter.

Troisième raison du succès. De nouveau coup de chapeau aux tribunaux rabbiniques israéliens. Face à nous aujourd’hui, pendant plus de quatre heures, un dayan, qui avec une connaissance sage et subtile de la psychologie humaine a su désamorcer, un à un, les obstacles. Coup de chapeau aussi au département des ”Agounot” du Tribunal rabbinique. La direction de ce département a mis en place un système qui fonctionne et qui permet en utilisant des moyens juridiques et psychologiques de permettre, à une femme – et aussi à son mari – de se libérer d’un lien conjugal honnis.

Libérer la femme mais aussi le mari. ” Je comprends maintenant que cela aurait dû être fait depuis longtemps”, a murmuré l’ancien mari d’Esther, au terme du guet.

Quelques minutes après la remise du guet, Esther m’a dit ces quelques phrases à la fois terribles et pleines d’espoir : Hier, je marchais dans la rue en me sentant prisonnière, enchaînée, dans un tunnel sans fin, aujourd’hui brusquement je me suis sentie renaître.

Yithro et le “One woman show”

 

Cette semaine, nous lisons la paracha de Yithro.  Le prêtre de Midyan et beau-père de Moshé a entendu parler des miracles de la sortie d’Egypte et décide de rejoindre le peuple hébreu. Au début de la paracha, Yithro donne à son gendre un conseil qui jusqu’à nos jours reste le fondement de la gouvernance moderne : la création d’un système juridique basé sur une hiérarchie d’hommes de mérite, de magistrats et de juges.

Certes le prophète, le géant, le leader qu’est Moshé aurait pu tout faire : diriger, juger, trancher. Mais Yithro instaure le principe de la séparation des pouvoirs et explique la raison :

וַיֹּאמֶר חֹתֵן מֹשֶׁה, אֵלָיו: לֹא-טוֹב, הַדָּבָר, אֲשֶׁר אַתָּה, עֹשֶׂה. יח נָבֹל תִּבֹּל–גַּם-אַתָּה, גַּם-הָעָם הַזֶּה אֲשֶׁר עִמָּךְ

Le procédé que tu emploies n’est pas bon. Tu succomberas certainement et toi-même et ce peuple qui t’entoure; car la tâche est trop lourde pour toi, tu ne saurais l’accomplir seul.”  Shemot, 18, 17-18

Pour être un leader, un vrai, il faut savoir déléguer. Il faut partager  dit Yithro, mandater, bien choisir ses conseillers, transférer ses pouvoirs. Un principe, enseigné dans les département de Sciences politiques et de Management à chaque étudiant débutant.

Cette nécessité de déléguer, nous interpelle aussi à nous ” les One Woman Show”, spécialisée en acrobatie du timing : travail-maison-enfants-mari-parents-amis-shabbat-gym-pessahbientôt… Délègue ! nous dit Yithro. Chaque personne doit en planifiant ses actions, sa journée, faire la différence entre l’essentiel et le secondaire, entre le primordial et l’accessoire. Déléguer c’est crucial tout autant pour un Premier ministre que pour une femme.

Plus encore, la capacité de déléguer est capitale pour toi, mais aussi pour ton peuple, dit Yithro à Moshé : Tu succomberas certainement et toi-même et ce peuple qui t’entoure.

Si nous ne transmettons pas des responsabilités à nos bambins, si nous ne délèguons pas les tâches du quotidien à nos maris, si nous ne partageons pas nos devoirs avec nos amis, nos collègues, si nos élèves nous entendent sans nous écouter, il nous sera difficile de poursuivre le chemin, mais pire, le peuple, les enfants, la famille, les amis aussi seront victimes de ce “one woman show”.

Shabbat Shalom

 

Paracha et Actualités – La majorité a-t-elle toujours raison ?

 

 

La très belle parasha, de cette semaine, Beshalach, Shabbat Shira, commence par décrire le périple du peuple d’Israël :

וַיַּסֵּב ה אֶת-הָעָם דֶּרֶךְ הַמִּדְבָּר, יַם-סוּף; וַחֲמֻשִׁים עָלוּ בְנֵי-יִשְׂרָאֵל, מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם.שמות יג, יח

Hachem fit dévier le peuple du côté du désert, vers la mer des Joncs et les enfants d’Israël ” hamoushim”, partirent du pays d’Égypte. Chemot, 13, 18

A première vue, le terme de hamoushim, montre que les enfants d’Israël quittèrent la terre d’Egypte, “armés”. C’est la traduction littérale de “hamoushim”. Etant donné que Hachem leur a fait traverser un désert, Il les a fait voyager en armes. Pour traverser un désert, on a besoin de s’équiper, de s’organiser.

Mais après cette explication très logique, Rachi, une nouvelle fois, nous donne un éclairage tout autre, créatif et contemporain.

Hamoushim, nous dit Rachi, vient de la racine hamech, cinq. Hamouchim, c’est donc que seulement un cinquième des enfants d’Israël est sorti d’Egypte. Un sur cinq. Les quatre cinquième, donc 80 % sont restés en Egypte. Morts pendant les trois jours de ténèbres parce qu’ils n’avaient pas cru dans l’appel de Moshé ou qu’ils désiraient rester dans le pays qui les avait abrités pendant plus de deux centenaires.

Quoi qu’il en soit, la majorité écrasante, des descendants de Yaacov ont choisi de rester en Egypte. Et une petite minorité, un cinquième seulement, a décidé de suivre Moshé. La suite de l’histoire montre que c’est la minorité qui a eu raison. Les quart cinquième du peuple d’Israël sont tombés dans l’oubli de l’histoire et les héritiers du “cinquième du peuple d’Israël”, de la petite minorité, qui a suivi Moshé, forment aujourd’hui le peuple juif en Israël et dans le monde.

Dans l’époque de globalisation dans laquelle nous vivons, où les géants multinationaux décident des loisirs, du quotidien du citoyen du monde, où les réseaux sociaux imposent le mainstream, où la légitimité s’obtient en nombre de “like”, qui dit que cette culture dominante soit le bon chemin. Qui dit qu’un courant religieux, politique ou un autre, aujourd’hui majoritaire, détienne la vérité.

Qui dit que la majorité a toujours raison. Certes, la démocratie, est de nos jours, le système de gouvernance le plus efficace, le plus juste. Mais le choix du peuple d’Israël, au moment de la sortie d’Egypte, montre que c’est une minorité qui a eu raison, c’est le pari, le courage, l’intuition, la vision d’un cinquième seulement du peuple d’Israël et de leur leader qui nous a permis d’exister aujourd’hui.

 

 

Regard sur l’actualité d’il y a 4000 ans

Dans la parasha ( section ) de la Tora que le monde juif lira ce shabbat, Hayé Sarah, dans le livre de la Genése, il est écrit:

Abraham défaillit et mourut, dans une heureuse vieillesse, âgé et satisfait; et il rejoignit ses pères. Il fut inhumé par Isaac et Ismaël, ses fils, dans le caveau de Makpéla, dans le domaine d’Efrôn, fils de Çohar, Héthéen, qui est en face de Mamré;
Genése 25 – 8-9

ח וַיִּגְוַע וַיָּמָת אַבְרָהָם בְּשֵׂיבָה טוֹבָה, זָקֵן וְשָׂבֵעַ; וַיֵּאָסֶף, אֶל-עַמָּיו. ט וַיִּקְבְּרוּ אֹתוֹ יִצְחָק וְיִשְׁמָעֵאל, בָּנָיו, אֶל-מְעָרַת, הַמַּכְפֵּלָה: אֶל-שְׂדֵה עֶפְרֹן בֶּן-צֹחַר, הַחִתִּי, אֲשֶׁר, עַל-פְּנֵי מַמְרֵא
בראשית כה – ח,ט

Tout sépare depuis leur jeunesse Isaac et Ismaël. Mais dans ce moment tragique de la disparition de leur père, Itshak ancêtre du peuple juif et Ismaël, ancêtre du peuple arabe, trouvent la voie de la coexistence, décident de dépasser la violence de leurs différents et vont ensemble enterrer leur père Abraham.