Noah Flug, adieu

Noah Flug est décédé jeudi matin à l’hôpital Shaaré Zedek de Jérusalem à l’âge de 86 ans. Un des grands hommes d’Israël. Un vrai, un pur, un dur. Noah FLug avait le talent, le culot, la passion et l’intégrité de ceux qui mènent des combats avec succès. D’abord le combat pour la vie. Ce juif polonais, avait échappé plusieurs fois à la mort. Membre de la résistance antinazie, caché dans le ghetto de Lodz, envoyé au camp d’extermination d’Auschwitz et ensuite encore dans deux camps.

Emigré en Israël, le combat devient celui du souvenir. Ne jamais oublier. Jamais. Jamais, disait cet homme qui avait perdu jusqu’au dernier membre de sa famille dans la Shoah. Mais ce combat là et sa nomination au conseil d’administration de Yad Vashem n’était pas pour lui l’essentiel.  Noah Flug a voué sa vie au combat pour le respect des rescapés. Pendant des années Flug a mené la vie dure aux hommes politiques et surtout  à la direction des finances de l’Etat d’Israël.  Face aux fonctionnaires du Trésor qui faisaient des comptes, souvent sordides, Flug parlait lui d’un devoir historique. Une exigence morale pour l’Etat d’Israël.  Et à raconter la détresse de ces rescapés de la Shoah dans l’impossibilité d’acheter des médicaments dans l’Israël des années 2010.

A la tête de l’organisation qui représentait les rescapés, Flug a donc exigé que ceux qui avaient échappé à la mort, puissent vieillir avec dignité et mourir en paix. Ce combat pour des allocations sociales – de survie –  n’a abouti que il y a quelques mois à peine. Au cimetière du kibboutz de Kiriat Anavim, dans les forêts de Jérusalem, il étaient nombreux, dans la foule, ces hommes et ces femmes, aux cheveux blanc, avec des cannes et sur des chaises roulantes, et des numéros sur leurs bras, venir dire merci, un dernier merci.

Il y a quelques mois, Flug, entouré fièrement de ses quatre petits enfants, de sa femme Dorota et de ses deux filles,  avait dit  aussi que le plus important de ses succès était ces quatre jeunes qui parlent l’hébreu,  cette vie qui avait surgit de l’enfer et  de l’abomination.

Le 9 Av, Bétar et la révolte sociale 2011

 

Pour faire le lien entre la journée du 9 Av, la destruction du Temple de Jérusalem et la révolte sociale qui éclate en Israël cet été 2011, le Rabbin Benny Lau, a raconté l’histoire suivante tirée du Talmud:

En l’an 68 de l’ère chrétienne, le Temple de Jérusalem est détruit. 67 ans plus tard, en l’an 135. Bétar, au nord est de Jérusalem, la cité forteresse des Juifs de Judée dirigée par Bar Kochba, dernier lieu de résistance à l’Empire romain, tombe à son tour.  Le désastre est total pour les Juifs de Judée. Pendant des siècles, depuis la chute de Bétar, jusqu’à l’arrivée des pionniers juifs au milieu du 18è siècle, la Judée et la Terre d’Israël ne furent plus qu’un désert.

Pourquoi Bétar est tombé demande une Mishna. Et la Mishna répond. Bétar est tombé parce que lorsque le Temple de Jérusalem a brulé, les Juifs de Bétar ont allumé des bougies et se sont réjouis. Il y a 2000 ans, le Temple était contrôlé par l’aristocratie du peuple juif, des dirigeants spirituels, des propriétaires fonciers, des riches. Ils exploitaient ouvertement ou avec vices et stratagèmes, les petites gens, les pauvres des campagnes, la périphérie. Et les hommes de Bétar se sont réjouis de la chute de ceux qui les avaient spoliés. Et dit la Mishna, ils sont tombés pour s’être réjouis.

Il y a 2000 ans, les fissures au sein du peuple juif, l’injustice sociale imposée par les uns, la vengeance des autres, le manque de solidarité entre le centre, alors Jérusalem et la périphérie, alors Bétar avaient provoqué la débâcle du peuple juif.

 

L’été israélien

 

Les chiffres

Cinq sous des tentes il y a quelques trois semaines. 30.000 , il y a 20 jours. 70.000 il y a 10 jours.  113.000 ou 150.000, il y a une semaine ( bataille des chiffres entre les médias). 250.000 dans les rues de Tel Aviv hier soir. 30.000 à Jérusalem, quelques milliers à Ashdod, Dimona,  Kiriat Shmona, Eilat… Quelques  300.000 israéliens sont descendus dans la rue, samedi soir à travers Israël.

Les pancartes

Contre Bibi. Beaucoup contre Bibi. Violemment contre Bibi. Bibi out, Bibi, Assad, Moubarak (!) même combat.  Bibi chevauchant un porc(!). Pas seulement contre Bibi. Des pancartes aussi contre les patrons de l’économie israélienne, les magnats de la finance, contres les grandes familles qui contrôlent Israël, les grandes fortunes, les cartels et les monopoles. Benjamin Netanyaou, aux cotés de Nohi Dankner et Itshak Tchouva ( qui pourtant donnent des millions aux hôpitaux, aux jeunes éthiopiens, à la bibliothèque de Kyriat Shmona, aux soldats, aux musées, mais  nous ne voulons plus de charité scandent les manifestants, nous voulons la justice sociale). Il y avait aussi des pancartes contre les symboles de l’Israël du luxe et du capitalisme. Des pancartes dures, brutales, comme ces belles femmes bijoutées de Stern,  le leader de la bijouterie de luxe muées en femmes laides avec des bandeaux noirs à la Moshé Dayan.

Les drapeaux

Beaucoup de drapeaux dans cette manifestation. Des grands drapeaux bleus et blancs comme pour dire d’abord nous disons oui à notre pays, sans limite, mais nous voulons un autre quotidien.

 Les slogans  

” Le Peuple exige la justice sociale.” “Le  Peuple a décidé la justice sociale”.” Bravo à nos policiers. Les policiers sont avec nous eux aussi ne finissent pas les fins de mois. ” “Bibi, Sharon, Barak vous avez tuez l’espoir.” ” Nous ne sommes pas des anarchistes, nous payons nos impots et nous faisons l’armée. ” Bibi écoute nous”.  “Oouah Oouah Regardez qui arrive au galop, l’Etat providence est de retour”. “Oouah Oouah Sababa Israël, le vrai, c’est nous.”  “Nous sommes à gauche et nous sommes à droite, nous sommes laïcs et religieux, nous sommes juifs et arabes, nous sommes tout Israël.”

La scéne

Rita, Yehudit Ravitz, Shlomo Artzi sont venus – bénévolement évidemment – chanter, crier avec le peuple. Les orateurs, plus seulement les jeunes des tentes. Les organisateurs ont cette fois donné la parole à tout Israël. La mère célibataire de Dimona, le chauffeur de taxi de Jérusalem, , un habitant d’une implantation ( Ofra,Beit El ( implantions de la Judée et Samarie), Tel Aviv, Dimona même combat), le rabbin Benny Lau ( le prophète Irmiyaou avait dit au roi Si  vous n’installez pas ici un royaume de justice vous tomberez. Et le Roi est tombé. C’était il y a plus de 2000 ans, Le scénario se répétera aujourd’hui.) , le poète arabe (Juifs et Arabes refusent d’être des ennemis, Juifs et Arabes veulent finir leur fins de mois)   la jeune fille religieuse de Lod, qui travaille pour aider ses parents à payer la note d’électricité, Charlie Bitton (les panthères noires sont de retour, enfin! j’ai attendu 40 ans).

Et aussi Guilat Shalit

Brusquement au milieu de la manifestation, un slogan, Le peuple veut Guilat Shalit. “Il ya un étudiant qui aurait du être avec nous ce soir là, et qui n’est pas là et qui gémit dans un trou à Gaza ” crie un orateur. “Le peuple veut Guilat Shalit” répondent les dizaines de milliers de manifestants.

Questions

S’agit il d’un mirage, d’une colère qui éclate dans la chaleur humide et suffocante de l’été et qui s’évanouira l’automne et les pluies venant.  De mots d’ordres qui perdront leurs sens au premier danger sécuritaire qui ne saurai tarder. Ou s’agit t-il d’une vraie vague de fond,  du retour de l’Israël passionnel des débuts.

Est-ce un ras le bol face à un Israël, dur, égoïste, de moins en moins idéologique. Est-ce le cri d’un peuple qui ne veut plus vivre seulement au gré du conflit arabe. Est-ce la fin de l’indifférence légendaire de l’Israélien face aux conflits sociaux. Est-ce la venue au pouvoir d’une génération qui criera à chaque injustice. Est-ce que cette énergie à la fois  impulsive et sincère, sympathique, enthousiaste et profonde se traduira par des changements concrets? Est ce que cet été israélien deviendra le prologue à un nouvel Israël? 

9 Av

Le Rabbin Benny Lau a fait le lien entre ces manifestations pour plus de justice sociale et la  journée du 9 av, que le peuple juif marquera ce lundi soir. “Les Temples de Jérusalem, le Premier et le Second, n’ont pas été détruits par nos ennemis. Nous, le peuple juif, notre haine gratuite, nos injustices, c’est nous qui avons détruit le Temple de Jérusalem.”