Guet : Addis Abbeba – Tel Aviv

Loin du regard des médias, s’est déroulée ces derniers jours une affaire de guet sur trois continents, impliquant des dirigeants israéliens, éthiopiens et américains, des sommités rabbiniques et le Mossad, une affaire digne d’un roman d’espionnage.

Sarah (nom d’emprunt) de la communauté éthiopienne vit en Israël avec son mari et ses enfants. Il y a deux ans, sans prévenir, son époux disparait, laissant en Israël, une jeune femme aguna, seul avec ses enfants. Après plusieurs mois d’enquête, avec l’aide de l’ambassade d’Israël en Ethiopie et du Mossad, le département des agunot du Tribunal rabbinique de Jérusalem découvre que l’époux est retourné en Ethiopie. L’époux promet de donner le guet et le directeur du département, le rav Eliahou Maïmon, envoie immédiatement en Ethiopie, le rabbin Alon Nagussa, spécialiste de la communauté éthiopienne.

Une fois arrivé en Ethiopie, le rav Nagussa découvre que l’époux a disparu et contrairement à ses promesses n’est pas venu au rendez-vous pour remettre le guet à sa femme. De nouveau, les affaires étrangères et le Mossad, après un accord du Premier ministre Netanyaou se mettent à la recherche de l’époux récalcitrant. Après des mois de recherche, le mari est repéré il y a quelques semaines au Nord de l’Ethiopie. Mais dans cette région du Tigré, des combats violents et sanglants opposent l’armée éthiopienne avec le Front de libération du peuple du Tigré. Envoyer un rabbin et procéder à une remise de guet dans la région est risqué et techniquement impossible. L’inexistence de télécommunications ne permet pas un contact avec Israël nécessaire pour la remise du guet.

Le rav Maimon envoie un émissaire pour convaincre le mari de donner le guet et de se rendre avec lui plus au sud de l’Ethiopie. Une opération risquée est organisée par les services de la sécurité israélienne. Les deux hommes marchent à pied pendant près de deux jours dans les zones de combat avant d’être pris en charge par une jeep, qui les conduit sains et saufs, dans un hôtel de la capitale d Gondar, puis dans la capitale d’Addis Abbeba.

L’épouse est dépêchée au Beit Din de Tel-Aviv, et la cérémonie du guet a eu lieu la semaine dernière par conférence vidéo. Après deux ans Sarah a retrouvé sa liberté.

Quel est le prix que les services de la sécurité israélienne ont dû payer pour mener à bien cette opération risquée. Silence total des autorités. La liberté d’une femme a un prix que l’Etat d’Israël a accepté de payer.

Une Meguila écrite par une femme est-elle cacher ?

וַתִּכְתֹּב אֶסְתֵּר הַמַּלְכָּה בַת אֲבִיחַיִל וּמָרְדֳּכַי הַיְּהוּדִי אֶת כָּל תֹּקֶף לְקַיֵּם אֵת אִגֶּרֶת הַפּוּרִים הַזֹּאת הַשֵּׁנִית

מגילה ט, כט.

Pour ne pas faire durer le suspense, je vous donne la réponse d’emblée, une Méguila de Pourim écrite de la main d’une femme est strictement cacher, selon un jugement du grand décisionnaire sépharade, le Rav Ovadia Yossef.

L’importance de la question du point de vue halachique est liée à l’obligation de lire la Méguila d’Esther non pas dans un simple livre imprimé, mais dans un parchemin écrit à la main par un scribe selon des lois très strictes d’écriture, identiques à celles de l’écriture d’un rouleau de la Thora.

Sur l’écriture d’un rouleau de Thora, le Talmud, (Guittin, 45), précise qu’un homme et non une femme doit écrire le parchemin.  

Or, écrit le Rav Ovadia Yossef, les femmes ont l’obligation de lire ou d’écouter la Méguila d’Esther, le miracle de Pourim est celui d’une femme et donc “nous devons poser la question si la Méguila peut être écrite de la main d’une femme. “

La question a été posée maintes fois par les sages. Le Hida et d’autres sages ont déjà écrit qu’une Méguila écrite par une femme était strictement cacher.

Le Rav David Oppenheim a donné une explication à partir du texte même de la Méguila : ” Dans le texte de la Méguila, il est écrit   La reine Esther, fille d’Avihail écrivit)  Méguila d’Esther, 9, 29). ” C’est à partir de ces termes, que le Talmud, (Méguila, 19) a décrété que la Méguila, comme les rouleaux de la Thora, devait être écrite sur un parchemin, avec de l’encre et un porte-plume, et comment imaginer que la première Méguila écrite par Esther ne serait pas cacher !

En d’autres termes, si la Reine Esther a écrit la Méguila,il y a quelques 2500 ans, les femmes juives de génération en génération, peuvent elles aussi, apprendre les règles de la calligraphie hébraïque et écrire la Méguila d’Esther.

Un homme “agoun”

L’époux “agoun” face à une épouse qui refuse de recevoir son guet est un sujet dont on parle beaucoup moins que le drame de la femme agouna.

Le cas d’un mari “agoun”, est certes bien moins grave dans ses conséquences. Alors qu’une femme agouna, ( son mari refuse de lui donner son guet ) n’a aucune issue, le mari “agoun”, ( sa femme refusant de recevoir le guet), a du point de vue de la halakha plusieurs possibilités de continuer sa vie, y compris celle de se remarier (bien que l’autorisation d’un second mariage soit compliquée à obtenir). S’il a un enfant avec une autre femme, cet enfant sera légitime alors que dans le cas d’une femme sans guet, cet enfant sera “mamzer”, batard.

Tout en étant beaucoup moins dramatique pour le conjoint, l’attitude d’une femme qui refuse de recevoir son guet, est tout aussi reprochable. Comme pour la agouna, il y a là une exploitation inacceptable de la Loi juive. Ce que nous disons pour défendre la femme agouna, doit aussi être dit pour l’homme agoun. Lorsqu’il n’y a plus de chance de “shalom bait”, de vie maritale, le guet doit être donné immédiatement par l’époux et doit être reçu immédiatement par l’épouse.

Grâce à une décision d’une importance majeure pour le droit de la femme, décision datant d’un millier d’années, décrétée par Rabbenou Guershom, Meor Hagolah, (c. 960 -1040), un des premiers et des plus importants décisionnaires halachiques du monde ashkénaze, le divorce juif, le guet ne peut plus être donné par l’homme sans le consentement de l’épouse. L’épouse doit accepter le guet et le recevoir directement ou par un émissaire nommé par un Beit Din.

Le phénomène de femmes qui refusent de recevoir leur guet n’est pas rare. Selon les données des Tribunaux rabbiniques, il serait même plus important numériquement que le nombre de maris refusant de donner le guet à leur femme.

Cette semaine, la Cour Suprême saisi en appel par l’épouse qui refusait de recevoir son guet a tranché et donné raison à l’époux. Pour la Présidente de la Cour, la Juge Esther Hayout, le chantage de l’épouse est condamnable et la Haute Cour a donné raison au Tribunal rabbinique qui avait condamné la femme a une amende journalière de 150 shekels, puis de 220 shekels tant qu’elle refusera de recevoir son guet que l’époux a déjà déposé devant le Beit Din.

Le couple qui s’est marié il y a trois ans, s’est séparé après quelques jours de mariage. L’époux sous le conseil du Beit Din a accepté de transmettre à l’épouse les cadeaux du mariage pour une valeur de 60.000 shekels. Mais l’épouse continue depuis trois ans a refusé le divorce.

Dans le même dossier, La Haute Cour a par contre rejeté la décision du Beit Din de réduire la valeur de la Ketouba de l’épouse de 500 shekels par jour, tant que le refus de recevoir le guet se poursuivrait et permet ainsi à la femme de demander sa kétouba dans son intégralité, une fois qu’elle aura accepté de recevoir le guet.

Non au guet-chantage

 

Cette semaine, au Tribunal rabbinique de Tel-Aviv, quatre femmes, deux de Paris, une de Strasbourg et l’autre de New York, ont été libérées.

Elles ont obtenu leur gett, après un combat âpre.

Six ans, quatre ans, 24 mois et 18 mois de souffrance.

Quatre histoires de femmes courageuses qui ont choisi de se battre, de lutter pour leur dignité, leur liberté, leur droit d’être une femme maître de son destin.

Les quatre époux, homme d’affaires, avocat, médecin, influents dans la communauté juive étaient persuadés d’être dans leur bon droit.

L’un d’entre eux est d’ailleurs un des 84 hommes signataires de la pétition de la Wizo pour les agunot !

Il nous a expliqué que ” sa femme à lui, n’était pas une aguna, et pourquoi le fait qu’il n’avait pas donné le guet à sa femme, deux ans après leur séparation, était légitime.”

C’est dire l’ignorance et l’embrouillamini.

” Nous avons un différend sur la répartition du patrimoine.”

” Je ne lui donnerais le gett, qu’après le divorce civil.”

” Elle m’a trompé, alors je ne lui donnerai pas son guet”.

” Je veux la garde des enfants. Donc pas de guet, tant qu’elle ne cédera pas. “

Ces arguments des époux récalcitrants nécessitent quelques éléments de réponse.

Le guet ne peut pas être utilisé comme levier de pression et comme monnaie d’échange dans un conflit sur le patrimoine.

Le guet n’est pas un moyen de punition dans les mains de l’homme parce que sa femme l’a trompé.

Le guet doit être donné sans rapport avec le divorce civil. En France, si une loi exige la tenue d’un mariage civil avant le mariage religieux, Il n’y a pas de loi identique sur le divorce. Par souci, trop strict du respect de dina demalkhouta dina” , les Tribunaux rabbiniques français ont établi une règle, qu’il faut changer si l’on veut mettre fin au “guet-chantage” et au “guet-racket”. Le lien avec le divorce civil est devenu un moyen pour nombre de maris d’extorquer de l’argent, des droits, des avantages.

Donner le guet à sa femme est une mitzva, un commandement biblique. (Dvarim, Deutéronome,24)

Certes, nous dit le cinquième Livre de la Torah, l’homme doit donner le guet de son plein gré, mais il n’est pas écrit que le guet est négociable. Détourner le sens de cette mitzva est une enfreinte grave à la Loi juive.

Les arguments utilisés par ces époux montrent l’urgence d’une clarté dans les messages des dirigeants religieux et communautaires. Le message doit être intelligible et clair.

Je rappelle la position du Rav Shlomo Stassman, un des juges rabbiniques les plus importants et influents d’Israël : “Lorsqu’il n’y a plus de chance de “shalom bait”, de paix dans le foyer, le guet doit être donné immédiatement.”

Haya et le gett impossible

 

Je vous mets souvent au courant d’histoires à succès, de femmes agunot que nous avons réussi à sauver. Et en effet des dizaines et dizaines de femmes ont pu retrouver leur liberté ces derniers mois; Malheureusement, nous avons aussi des histoires nombreuses et dramatiques, sans issue. Ces jours difficiles du mois juif d’Av je partage avec vous, une de ces histoires pour faire entendre la voix de celles qui vivent derrière des barreaux d’acier.

Elle s’appelle Haya (nom d’emprunt). Elle a 28 ans, vit dans un des quartiers orthodoxes de New York avec ses deux filles de 10 et 11 ans, sans espoir de vivre librement. Mariée sans l’être, interdite à tout homme, seule face à son destin.

L’histoire débute il y a douze ans. Ses parents sont en Israël pour quelques mois et réside dans un des quartiers orthodoxes de Jérusalem. Elle a alors 14 ans. Près de leur maison, un homme de 12 ans son ainé, Yaacov, (nom d’emprunt) s’éprend d’elle. Et lorsque la famille revient à New York, Yaacov s’installe lui aussi à New York et réussit à convaincre la jeune fille et sa famille. “Haya est la femme de ma vie”. Elle a 16 ans, il a 30 ans. Au bout de quelques mois, le roman d’amour tourne au cauchemar, violences physiques et morales de plus en plus graves. Le couple se sépare. Haya a 18 ans. Débute alors ce que Haya nomme la “descente aux enfers”. Le divorce civil traine devant plusieurs tribunaux de New York en raison d’appel et contre appels de l’époux. Il ne sera prononcé qu’en 2017, après dix ans de procédure !

Pour le divorce religieux, les choses se compliquent chaque jour. Devant plusieurs Beit Din de Brooklyn, l’époux annonce ouvertement qu’il ne donnera jamais le gett à sa femme. En 2011, alors en vacances en Israël, il est convoqué au Beit Din de Jérusalem, mais en raison d’une erreur grave du dayan d’alors il promet de donner le gett à New York, ce qu’il ne fera évidemment jamais après avoir réussi à quitter Israël en échange d’une caution.

Avec le Beit Din de Tel Aviv nous avons mené de multiples tentatives : pression sur la famille de l’époux, famille connue de rabbins du quartier orthodoxe de Beit Vegan à Jérusalem, des heures de négociations y compris nocturnes entre les juges rabbiniques et l’époux, réfugié entre temps à Los Angeles, pressions financières de toutes sortes, y compris sur ses biens en Israël. Mais rien n’y fait; le scénario cauchemardesque se répète à plusieurs reprises: après des mois de refus ou de silence, ouverture de négociations, l’épouse cède peu à peu sur tout, abandonne ses biens, ses droits à une pension alimentaire. L’époux dit oui puis quelques jours après dit non et clame qu’il ne donnera jamais le gett à sa femme qui restera sa femme à vie …

Haya a 28 ans et face à elle le néant. ” A cause de cette affaire, je ne dors pas la nuit” a dit un jour le dayan de Tel Aviv chargé du dossier. Et il n’est pas le seul.

Crédit photo : Merci à Yad Laisha et à l’actrice Hadar Dadon d’Habima pour l’utilisation des photos. En cas de reproduction de l’article ou-et des photos, obligation de préciser le crédit photo et l’origine : En direct de Jerusalem, le Blog de Katy Bisraor Ayache.

 

Deux histoires de gett

 

 

Nous avons cette semaine réussi à libérer deux jeunes femmes d’un mariage impossible, l’une de Paris, l’autre de New-York.

Elles ont eu leur gett  en Israël, après des mois de cauchemar. Deux histoires qui se ressemblent. Séparée depuis plus d’un an, sans espoir de “shalom bait”, de poursuivre une vie de couple, leur mari est convoqué à plusieurs reprises par plusieurs Beit Din locaux. L’époux “ignore” les convocations, puis promet de venir et ne vient jamais, mais continue sa vie, laissant sa jeune épouse, dans un tunnel sans fin, ni mariée, ni divorcée.

Certains rabbins et dirigeants de communautés, malheureusement jouent le jeu du mari, tentent de convaincre la femme de céder à des demandes sans fondement, et conseillent même au mari, dans le cas de New York, ” à laisser trainer l’affaire, elle finira bien par céder.”

Contrairement à cette attitude inacceptable d’un certain leadership, le Beit Din de Paris et un des Beit Din de Brooklyn, comprennent qu’ils sont face à “un chantage au gett”, ou à “un refus de gett non avoué ” de la part de l’époux et ne rien faire, risque d’imposer à une femme de moins de trente ans, une vie sans espoir.

La chance de ces deux jeunes femmes, c’est donc d’abord la mobilisation du Beit Din local, à Paris et à Brooklyn, qui ont fait une analyse juste de la situation. 

C’est ensuite, la politique de ‘” tolérance zéro” face aux maris récalcitrants menée avec détermination par le Beit Din d’Israël, dans ces deux cas, le Rav et Dayan Zvadia Cohen. Avec ténacité, le Beit Din d’Israël, depuis quelques années tente d’imposer à l’ensemble des Beit Din une politique claire : une femme ne peut plus être otage. Certes, il y a encore des bavures, des cas mal gérés, des situations intolérables, mais le message majeur est celui d’une tolérance zéro.

Le mari récalcitrant de New York, n’a eu aucun problème à expliquer au dayan, ” chez nous, c’est comme cela, si elle veut son gett, elle devra d’abord accepter “, avant de présenter une longue liste d’exigences  financières et liées à la garde de leur enfant.

Le Dayan du Beit Din de Tel-Aviv lui a répondu ainsi “ Jeune homme, lorsqu’il n’y a plus d’espoir pour une vie de couple, un gett se donne et se reçoit sans condition aucune. C’est la halakha.”

La reine Esther et l’agouna

Au début des années 2000, plusieurs organisations de femmes qui luttent pour libérer la femme agouna, ont pris la décision de marquer la journée internationale de la femme agouna, le 13 du mois juif d’Adar, le jour du jeûne d’Esther.

Comme la reine Esther prisonnière dans son palais, la femme agouna est « ancrée », « enchainée » à un mari fantôme, femme morte-vivante, sans espoir, sans statut, sans liberté.

Le sujet est un des défis majeurs du monde juif moderne.

Tout d’abord cette tragédie concerne des milliers de femmes à travers le monde. (Et d’hommes, mais le sujet est tout autre, les conséquences halakhiques étant bien moindre, pour les hommes dont les épouses refusent de recevoir le guet.)

Le refus de donner le gett ou le chantage au gett est un méga-phénomène, notamment en Diaspora. En Israël, des lois très sévères permettent de limiter les maris vindicatifs exploitants d’une manière honteuse la halakha. En Diaspora, même les Tribunaux rabbiniques les plus efficaces ne peuvent rien, face à un époux qui refuse de libérer sa femme.

Dans plusieurs pays et notamment en Amérique du Sud mais aussi dans des pays européens comme en Belgique, des femmes mariées ayant perdu tout espoir de recevoir leur guett, ont choisi de continuer à vivre et même d’avoir des enfants. A la tragédie humaine de ces femmes enchaînées, se rajoute des questions douloureuses et souvent insolubles de mamzerout, d’enfants illégitimes.

Conscients de ces tragédies humaines, le législateur israélien et l’establishment religieux ont pris l’initiative de nouvelles lois, visant à décourager les maris récalcitrants. Par ailleurs, la signature d’un contrat prénuptial, conforme à la halakha, et limitant les risques d’igoun donne déjà des résultats dans plusieurs communautés, notamment aux Etats-Unis. La possibilité d’annuler à posteriori un mariage, bien que très rarement utilisé, fait débat.

Mais pour cette journée internationale de la femme agouna, disons l’essentiel : la responsabilité du phénomène incombe à chacun d’entre nous, citoyen juif d’Israël et du monde, leader rabbinique, éducateur, dirigeant communautaire et médiatique.

Le message doit être clair : un homme juif ne peut pas retenir par la force une femme qui a dit non. Un homme juif ne peut pas négocier la liberté de sa femme. C’est contraire à la morale, c’est une indignité, c’est un opprobre pour la Loi juive.

Dernièrement, j’ai représenté devant le Beit Din, une femme religieuse, orthodoxe, d’une trentaine d’année, originaire de New York, séparée de son mari depuis huit ans. Son époux, lui aussi orthodoxe est membre actif et donateur d’une grande communauté de Brooklyn. Chacun connait le drame, chacun à choisir de se taire pendant des années. Nous connaissons des histoires identiques à Miami, à Paris, à Buenos Aires et partout dans le monde.

Lors d’un procès au Beit Din de Tel-Aviv, le Rav Stessman, un des dayan, juge rabbinique, parmi les plus importants d’Israël dans le domaine du droit familial, a répondu ainsi à un mari qui expliquait son refus de donner le guet car ” cela ne faisait que six mois qu’il était séparé de sa femme et que le divorce civil n’avais pas encore été prononcé.”

Lorsqu’il n’y a plus de chance de “shalom bait”, de paix dans le ménage, lui a répondu le Rav Stessman, que l’homme dit je ne veux plus vivre avec elle, que la femme dit je ne veux plus vivre avec lui, le guet doit être donné immédiatement. Sans attendre un seul jour. Un jour de plus c’est une situation d’igoun. ”

En d’autres termes, le guett ne peut en aucune manière être un moyen de pression. Les questions de garde d’enfants, de règlements financiers après. Et même le divorce civil, après. Le guett, d’abord.

 

Pour celles, ou ceux qui souhaitent un conseil juridique, nous avons une permanence en anglais et en français, tous les soirs du dimanche au jeudi, de 20h à 21h au +97239797755.

 

Une nouvelle histoire de guet à succès

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Esther (nom d’emprunt), originaire de la ville de Lyon a eu son guet aujourd’hui, au Tribunal rabbinique d’Ashkelon, quatorze ans (!!!) après avoir divorcée  civilement. Pourquoi tellement d’années, pourquoi ce succès aujourd’hui ?

La première raison : Une femme qui après des années de souffrance, d’hésitation, de va-et-vient, de scrupules, de tergiversations, d’erreurs aussi, décide de lutter jusqu’au bout, de prendre son destin en main et choisis d’appliquer la formule des battantes : “Je Veux, J’Agis”.

Cela semble évident. Et pourtant, nous avons plusieurs dizaines de dossiers de femmes qui ont fait un tout premier pas, se sont adressés à nous, au Tribunal rabbinique, puis par crainte ont gelé leur démarche et sont restées prisonnières de leur destin.

La seconde raison à mon avis, est liée à une coopération étroite entre les tribunaux rabbiniques locaux, en l’occurrence, le tribunal de Lyon et les tribunaux rabbiniques israéliens. Dans plusieurs affaires que nous avons traitées avec succès ces derniers mois, c’est ce dialogue qui a permis de débuter.

Troisième raison du succès. De nouveau coup de chapeau aux tribunaux rabbiniques israéliens. Face à nous aujourd’hui, pendant plus de quatre heures, un dayan, qui avec une connaissance sage et subtile de la psychologie humaine a su désamorcer, un à un, les obstacles. Coup de chapeau aussi au département des ”Agounot” du Tribunal rabbinique. La direction de ce département a mis en place un système qui fonctionne et qui permet en utilisant des moyens juridiques et psychologiques de permettre, à une femme – et aussi à son mari – de se libérer d’un lien conjugal honnis.

Libérer la femme mais aussi le mari. ” Je comprends maintenant que cela aurait dû être fait depuis longtemps”, a murmuré l’ancien mari d’Esther, au terme du guet.

Quelques minutes après la remise du guet, Esther m’a dit ces quelques phrases à la fois terribles et pleines d’espoir : Hier, je marchais dans la rue en me sentant prisonnière, enchaînée, dans un tunnel sans fin, aujourd’hui brusquement je me suis sentie renaître.

Le Chofar du 131 rue Nahalat Benyamin

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À la veille de la fête du Nouvel An juif, l’effervescence règne au 131 de la rue Nahalat Benyamin, au sud de Tel Aviv. Près des nouvelles boutiques branchées du quartier du souk se dresse une  bâtisse, l’une des plus anciennes de Tel Aviv, — elle date des années 1930 — et elle recèle des trésors.

C’est l’atelier de fabrication des chofars d’Israël, « Barsheshet – Ribak Chofarot Israël ».

Des dizaines de personnes à la recherche d’un chofar pour Rosh Hashana et pour Kippour se pressent à l’intérieur de ce lieu où presque rien n’a changé depuis soixante-dix ans. Une forte odeur de bouc imprègne l’atmosphère; un peu partout sont accrochés des chofars de toute sorte et de toute taille. Il y a les machines pour creuser la corne du bélier, et les outils qui feront de cette matière brute l’instrument au son puissant, pur et profond qui, le jour de Rosh Hashana, ébranlera les hommes en prière.

Cet atelier raconte une belle histoire de rivalité et d’amitié. Dans les années 1950, Abraham Rivak hérita cet atelier de son oncle; déjà, en Pologne, depuis des centaines d’années, la famille fabriquait des chofars. A quelques milliers de kilomètres de la Pologne, les ancêtres de Tvika Bar Sheshet, avaient, eux aussi, fondé un atelier de chofars. C’était au XIVe siècle, à Barcelone. Le père du Rabbi Itshak Bar Sheshet, le Ribash, s’était rendu célèbre en sonnant le Chofar à six reprises pour annoncer le début du Shabbat à ses coreligionnaires. D’où le patrimoine de Sheshet, six en langue hébraïque. Six jours de la création, six sonneries du chofar. Expulsée d’Espagne, la famille Bar Sheshet s’installa pendant quelques siècles en Algérie, puis au Maroc, avant d’immigrer au milieu du XXe siècle à Haïfa. Et pendant ce temps, la fabrication des chofars se poursuivit de génération en génération.

Durant des années, les familles Rivak à Tel Aviv, et Bar Sheshet à Haïfa se sont livrées une guerre sans merci pour se partager le marché des chofars. Jusqu’au jour où Tsvika Bar Sheshet a proposé une alliance à son rival. Depuis, « Ribak Chofarot Israël » fabrique plus de 70% des chofars produits en Israël ; quant à Abraham Ribak et Tsvika  Barsheshet, ils ont scellé leur amitié en voyageant ensemble au Maroc, en Australie, en Afrique à la recherche de cornes de bélier, de mouton, d’antilope ou de gazelle de qualité. Leurs enfants, eux, ont introduit le marketing digital dans l’atelier familial.

Et la troisième génération ne veut pas changer de métier  « Fabriquer des instruments pour parler à Dieu, on ne quitte pas un tel métier ! »

 

Photo tirée du site  – www.shofarot-israel.com