La Soucca de Rose

 

« L’Éternel parla à Moïse en ces termes : “Parle ainsi aux enfants d’Israël : le quinzième jour de ce septième mois aura lieu la fête des Tentes, durant sept jours, en l’honneur de l’Éternel…”. » (Lévitique 23, 33‑34)

 

Dans la ville de Safed, chacun connaît l’histoire de la Soucca de Rose.

En cette fête de Souccot, Rose n’aurait pas de soucca. Son mari venait de la quitter pour rejoindre les anges dans les cieux. Et comment une femme âgée de quatre-vingt-cinq ans, et sans enfants, construirait-elle seule une soucca ? Rose regardait le balcon fermé, les bois de la soucca entreposés avec soin par son mari, les rideaux colorés enveloppés dans du plastique, et la boîte à outils de souccot, ampoules, tournevis et marteaux.

Rose s’était résignée à ce Souccot sans soucca, pour la première fois depuis soixante-cinq ans — depuis cette époque où, rescapée des camps de la mort, elle avait rencontré sur le bateau l’homme qui deviendrait son mari quelques semaines plus tard. Seule, elle sentait les larmes lui monter dans la gorge — Rose, qui était fière et de plomb, ne pleurait jamais devant autrui. « Passez Souccot chez nous ! avait proposé sa voisine. Chez nous, c’est chez vous. » Et Rose avait accepté.

Cependant, le matin de Souccot, on frappe brusquement à sa porte : un jeune couple, lui les cheveux frisés, elle avec un long foulard vert, se présente, main dans la main. « Madame Rose, pouvez-vous nous rendre un service ? Nous sommes nouveaux à Safed, nous nous sommes mariés il y a trois semaines, juste la veille du Nouvel An. Et nous n’avons pas de soucca… »

Les larmes de Rose disparurent à jamais. La soucca des temps heureux allait connaître une nouvelle jeunesse.

Les Kapparot de Bné Brak

A la veille de Kippour, à Bné Brak, la ville orthodoxe près de Tel-Aviv, à même la rue, des marchands ont installé leurs cages à poulets.

C’est la coutume des kapparot. On prend un coq pour les hommes et les garçons, une poule pour  les femmes et les petites filles que l’on fait tourner  trois fois autour de la tête en récitant une prière qui demande le rachat des fautes ou plus exactement le transfert des fautes  sur le coq ou la poule. Puis, toujours au beau milieu de la rue, le sho’het, l’abatteur rituel égorge le poulet. Le poulet ou sa valeur monétaire est donné aux pauvres.

La racine de kapparot, est la même que celle du jour de Kippour. Kapar, en hébreu כפר  expier, expiation.

Pourtant, cette tradition des kapparot est de moins en moins suivie. D’abord parce que de nombreuses sommités rabbiniques ont de tous temps décrié cette coutume, à l’origine probablement païenne, coutume qui n’est pas rappelée dans le Talmud, ni dans les autres écrits fondamentaux du Judaïsme. Ses réserves s’expliquent aussi en raison des questions de cacherout, le poulet égorgé à la va-vite l’est-il vraiment dans les règles scrupuleuses de l’abattage rituel, pour des questions d’hygiène et aussi par souci de ne pas faire souffrir l’animal de plus la veille du jour où chaque Juif demande le pardon de ses fautes.

Et surtout, parce que la coutume qui s’est répandue, est que le rachat des fautes peut tout aussi bien se faire en donnant de l’argent.

Mais à Bné Brak, les vendeurs de kapparot font des affaires. Des dizaines de bambins grimpent partout pour mieux voir. C’est l’évènement dans le quartier. Les familles arrivent avec leurs bambins et leurs aieux, en priant avec ferveur que le coq prenne sur lui toutes les fautes de l’année. J’ai même vu un mari faire les kapparot à sa femme enceinte – à mon regret, elle n’a pas accepté d’être photographiée,  avec trois poulets, un coq si le bébé est un garçon, une poule si c’est une fille, et une autre poule pour elle.

Et si vous n’êtes pas à Bné Brak ces jours ci, j’ai pris pour vous, chers internautes, amis de mon Blog, quelques photos.

bne brak 2013

Les enfants grimpent partout pour voir la cérémonie des kapparot et de l’abattage rituel
Les cages à poulets à même la rue
Les cages à poulets à même la rue