La machine à écrire d’Amos Oz

 

Aux premiers jours du printemps 1988, je traversai le Néguev pour rencontrer Amos Oz.

Oz avait quitté Houlda, le kibboutz de ses quinze ans, pour Arad, la petite commune tranquille du désert. Il espérait soigner son fils souffrant dans cette ville de cure qui domine la Mer morte, sur les hauteurs des étendues désertiques. D’emblée, nous avions parlé du quotidien à Arad. Comment vivre dans cette localité isolée, loin du bouillon culturel de Tel-Aviv ? La réponse d’Amos Oz me rappela la célèbre formule de René Descartes : « Même si j’étais seul, dans une cellule de prison, sans un livre, sans un objet, je ne m’ennuierais pas. Je réfléchirais, je rêverais, je penserais. »

Entrer chez un écrivain, c’est un peu comme pénétrer dans l’intimité de son écriture — dans le lieu où les mots se créent, où son monde s’élabore et se dévoile. J’imaginais qu’Amos Oz me recevrait dans une pièce neutre. Il me fit entrer dans son bureau — ou, pour reprendre son expression, son « lieu d’écriture ». La pièce, spacieuse, se situait en contrebas de la maison et donnait sur un jardin d’hiver verdoyant, mais dépourvu d’horizon, comme refermé sur lui-même. Sur une table de travail, une machine à écrire attira mon attention. Oz remarqua mon regard étonné. Pendant les deux heures que dura notre entretien, il n’en dit mot. De nombreux livres s’entassaient sur les étagères ceinturant la pièce; une photo de famille en noir et blanc était posée sur la table. Oz était assis sur un siège aux proportions généreuses. Il y avait aussi un petit salon au sol couvert de moquette, et des plantes. L’ensemble baignait dans une atmosphère sereine qui me semblait pourtant magique. Ici étaient nés les livres emblématiques de l’Israël contemporain.

Oz était brillant, lumineux, spirituel — captivant. Il était surtout lucide quand il décryptait les hommes et la société de son temps. Il savait aborder un sujet compliqué et le rendre parfaitement clair. Avec aisance, il mettait à nu les complexités et les méandres d’une situation. Amos Oz était aussi chaleureux. Une amabilité parfois un peu forcée. Mais le geste, le sourire à la fois timide et rayonnant suscitaient le dialogue.

Comme si les écartèlements étaient un choix, il jonglait avec les contradictions. Tout s’entremêlait en filigrane. Une famille ancrée à droite et un engagement militant à gauche. Un écrivain laïc parlant à plaisir des choses juives. Une enfance dans un quartier pauvre de Jérusalem et une adolescence rebelle dans un kibboutz. Une famille déchirée — sa mère s’était suicidée alors qu’il avait douze ans — et une cellule familiale transcendée dans ses écrits comme dans sa vie. À première vue antinomiques, ces discordances devenaient harmonieuses au fil du propos. Un puzzle aux mille pièces éparpillées qui s’assemblent et s’emboîtent.

Oz parla de l’écriture, du rituel de la création des lignes et des mots. D’Arad à l’aube, de ses marches dans la lueur ténue qui précède le lever du jour enfoui dans la nuit, dans le désert encore endormi, encore imberbe, encore immaculé comme une source d’où jaillira peut être l’inspiration. Puis du café, chez lui, siroté avant de s’asseoir à son bureau, devant sa machine à écrire. Et des trois, quatre lignes écrites le matin, puis repensées, réécrites, rayées la fin de la journée venue. Oz parla aussi de l’hébreu, de la nécessité de vivre en Israël pour écrire, dans l’espace des consones et des voyelles hébraïques. Avec la pudeur de quelques mots épurés, Amos Oz raconta l’écriture, ce va et vient de la création, cette grande aventure de l’intérieur, cet entrechoc entre les mots, les idées et les profondeurs de l’homme.

Amoz Oz, véritable Proust de l’Israël moderne, est un grand écrivain. C’est aussi un grand conteur. Il passait avec dextérité des questions intimes aux grandes causes du monde. En l’écoutant, les banalités devenaient sublimes, les défis existentiels limpides. Je m’étais souvent demandé comment était il  devenu une sorte de prophète des temps modernes vers qui l’on se tournait quand la tempête faisait rage. Tous les écrivains talentueux ne publiaient pas des pamphlets  iconiques  à la une du Yédihot Aharonot à chaque nouveau soubresaut de la société israélienne. Cet entretien m’apporta un élément de réponse. Amos Oz parlait d’Israël avec un mélange de sévérité et de tendresse. Il témoignait d’un sens critique impitoyable tout en portant sur ses compatriotes un regard caressant, sensuel. Un amoureux averti qui ne transigeait jamais avec les règles de la clairvoyance.

Alors que nous étions près de l’escalier qui menait au portail, j’interrogeai Oz sur la machine à écrire. « Je sais, cela vous a surpris, répondit-il. Je n’écris pas avec un ordinateur, cela va trop vite. J’ai besoin du temps, des allers et retours, du grincement, de la musique, des hésitations de la machine à écrire. »

Cet écrit a été publié dans le livre, En direct de Jérusalem, Une journaliste raconte, que j’ai publié aux Editions Inpress en 2012.

Israël – Portrait de femmes, Vaan Nguyễn Thi Hong

 

Née de parents vietnamiens, Vaan Nguyễn Thi Hong est israélienne. Cette jeune femme belle et mélancolique a la colère des femmes sans racines. Elle voudrait hurler et gémir. A la fois contre le pays qui n’est pas le sien et contre la terre de ses aïeux qui lui est étrangère. Elle navigue dans la vie sans gouvernail. Un voyage au départ flou et à l’arrivée incertaine. Elle a parfois l’impression d’être un papillon qu’un ouragan emporte, une plante vivace qu’un cannibale dévore, une petite fille que l’on agresse. Le malaise des déplacés, des hommes du nulle part.

C’est en juin 1977 que Menahem Begin accueille un groupe de boat people vietnamiens sauvés en Mer de Chine, par le commandant d’un cargo israélien. Le leader de la droite vient de prendre le pouvoir après trente ans d’hégémonie travailliste et voit dans ce geste la raison d’être de l’État d’Israël. Begin se rappelle les rescapés des camps, au regard hagard, victimes de l’indifférence des nations et tend la main aux déshérités de la terre. Quelques dizaines au début, les réfugiés vietnamiens furent bientôt quatre cents. Le public israélien était enthousiaste. Israël aimait ce rôle de sauveur. Les enfants agitaient des drapeaux bleu et blanc pour accueillir les nouveaux habitants de leur ville. Des volontaires fournissaient meubles, habits et jouets. Rapidement, l’enthousiasme céda la place à une indifférence polie. Beaucoup de réfugiés quittèrent Israël. Ceux qui restent vivent en autarcie, défendant leur patrimoine culturel. Et leurs enfants, confrontés à l’histoire douloureuse de leurs parents, sont sans port d’attache. À la recherche d’une identité.

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Israël – Portrait de femmes, Ofra Strauss

Israël – Portrait de femmes, Vaan Nguyễn Thi Hong

Israël – Portrait de femmes, Hanin Zoabi

Comme une thérapie, Vaan Nguyễn Thi Hong a interprété, aux cotés de son père, son propre rôle dans le Voyage de Vaan, un film tourné au Vietnam sur la recherche pathétique d’espoirs à jamais disparus. Vaan et ses quatre sœurs ont servi dans l’armée israélienne. L’une d’entre elles s’est convertie au judaïsme pour pouvoir épouser un Israélien — un choix de convenance que Vaan a refusé de faire. Après avoir voyagé de par le monde, Vaan est revenue en Israël. Elle ne se sent chez elle, ni à Saigon, ni à New York, ni à Tel-Aviv; mais ici les mots, l’écriture, la poésie deviennent chaque jour sa raison d’être, son ancrage.

L’Israélienne dont les parents balbutient à peine l’hébreu, est devenue une virtuose de la langue. Les vers de Vaan ont un charme mystérieux. C’est une poésie authentique à la beauté dépouillée et sensuelle écrite dans un hébreu sans rigueur grammaticale, mais pur et vrai. Une langue qui échappe aux règles et jongle avec des associations étranges, créant une musicalité inconnue de la langue biblique. Vaan parle du quotidien, de la douleur, de la fragilité, de la dépression, des obsessions de ceux qui n’ont plus de pays. Elle raconte sa vie en porte-à-faux entre ses parents vietnamiens et ses amis israéliens. Elle parle du vide de l’immensité urbaine, mais aussi du bouillon de culture de Tel-Aviv. « La poésie est un hasard, j’ai commencé à écrire par solitude, pour effacer les souvenirs difficiles de mon enfance. J’étais une Asiatique proscrite  et qui rêvait d’être israélienne. Adolescente, j’ai même écrit au premier ministre pour ôter la mention “vietnamienne” sur ma carte d’identité. En vain. »

Au Café du Petit Prince, au 18 de la rue Nahalat-Benyamin, Vaan et ses amis poètes se rencontrent chaque semaine pendant des heures. Ce nouveau courant de jeunes poètes israéliens renoue avec la tradition de la poésie hébraïque du début du xxᵉ siècle. Les discussions passionnelles se terminent parfois en pugilats. Vaan et ses amis publient des poèmes dans des revues d’avant-garde applaudies par les critiques et ignorées du grand public. Vaan n’est plus vietnamienne, mais écrivaine et poétesse.

Cet article a été publié pour la première fois, dans mon livre, “En direct d’Israël”, paru aux éditions Inpress.

Israël – Portraits de femmes : Hanin Zoabi

Hanin Zoabi est palestinienne, arabe, citoyenne israélienne, députée et bête noire de la grande majorité des Israéliens.  Membre du Balad, le parti arabe nationaliste et laïc, elle côtoie la direction du Hamas, soutient l’Iran et justifie les attaques contre Israël. Célèbre depuis l’affaire de la flottille Marmara, elle est parmi les personnalités politiques les plus honnies de beaucoup d’Israéliens.

« J’ai le talent des activistes politiques : oratrice impétueuse, caractère bien trempé, coléreuse, audacieuse, passionaria et patiente. Entre le despotisme islamique, la misogynie arabe et l’occupation israélienne, j’ai pour mission de défendre les droits de mon peuple. Je n’ai qu’une peur, une seule : la faiblesse de l’homme. »

De taille moyenne, menue, vêtue d’une veste stricte et d’un pantalon cintré, portant des lunettes rondes sur un visage pâle encadré de cheveux noirs coupés au carré, Hanin Zoabi a du charme. Elle a obtenu avec mention ses diplômes en psychologie, philosophie et communication dans les universités de Haïfa et de Jérusalem. Native de Nazareth, elle a grandi dans le fief de l’aristocratie arabe, la grande hamoula des Zouabi. Ses oncles étaient des dignitaires du Royaume hachémite. Ils étaient aussi les alliés d’Israël : ils ont été maire de Nazareth, député, vice-ministre de la Santé, juge à la Cour suprême. L’un deux a même servi dans la Haganah; un autre a épousé une Juive.

« Les Arabes des Juifs. Gentils et dociles. Frottés à l’establishment israélien. Des naïfs. Comme les dirigeants palestiniens d’aujourd’hui. L’ancienne génération. Celle des passe-droits, du bon voisinage, de la coexistence d’intérêts. Les Palestiniens réprimés et conquis. Ils ont baissé la tête et se sont recroquevillés dans l’ombre. J’ai choisi un autre chemin. Je représente la génération des fiers ».

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Israël – Portrait de femmes, Ofra Strauss

Israël – Portrait de femmes, Vaan Nguyễn Thi Hong

C’était la fin de l’année à l’école primaire. Elle participait au concours de la meilleure rédaction. Les élèves juifs écrivaient en hébreu, les élèves arabes en arabe. Elle a gagné le concours.

« J’avais dix, onze ans. On m’a amenée à Jérusalem recevoir le prix des mains du président de l’État. Derrière moi flottait le drapeau bleu et blanc d’Israël. Je l’ai regardé et un sentiment étrange m’a assaillie. Ce n’était pas mon drapeau. J’aurais pu plonger dans l’amertume. J’ai choisi la lutte ».

La réalité a initié Hanin Zoabi à la chose politique. Son mentor est Azim Bashara, le fondateur de Balad, aujourd’hui réfugié dans les Émirats arabes et accusé par Israël d’espionnage au profit du Hézbolah. Elle a été attirée par ses convictions. Il a été séduit. Elle est son héritière.

« Je suis un contre-sens. Un paradoxe. Le contraire de l’archétype de l’Arabe musulmane. Une femme d’un peu plus de quarante ans non mariée, sans enfants, vivant chez ses parents et devenue l’icône de la lutte nationale arabe ! Et je parle. Je crie. J’exhorte. Je provoque. J’ignore les principes rétrogrades, les codes tacites de la tribu, les regards suspicieux des miens et les reproches des intégristes. Avant de déranger les Juifs, je dérange l’homme arabe. Dans son amour propre ».

Le féminisme ?

« Le féminisme m’ennuie. Parce qu’il est une évidence. Lorsque ma mère amenait un verre d’eau à mon père, je m’insurgeais. J’avais à peine cinq ans. Les questions sur ma vie de femme sont inutiles. La lutte essentielle est une lutte nationale. Je lutte pour que cette terre, qui n’est pas une terre juive, redevienne une terre arabe. »

Le passé juif ? La Bible ? Jérusalem, la ville du roi David ? Le Temple de Jérusalem ? Safed, la ville des Sages ?

« Il y a un passé juif. Mais aujourd’hui, il faut deux pays. La Palestine aux Palestiniens. Et Israël, un État laïc pour les Juifs et les Arabes. »

Donc, la Palestine et la moitié d’Israël pour les Arabes, et la moitié d’Israël pour les Juifs. Un pays et demi pour les Arabes et un demi pays pour les Juifs ?

« Pour vivre en paix, il faut deux pays. Les Juifs ne veulent pas la paix. Nous voulons la paix. Le Hamas veut la paix. »

La chartre du Hamas ? Les roquettes contre Sederot ?

« Un peuple qui occupe la terre d’un autre peuple n’a pas le droit de vivre en paix. »

Hanin Zoabi révolte beaucoup d’Israéliens. Elle veut révolter.

«  Je déballe. Haut, fort, violemment. Je dérange et j’aime déranger. Je m’inscris dans la durée. Le chemin sera long. J’ai de la patience. »

Pour le court terme, un dialogue ?

« Il n’y a pas de dialogue possible. Israël doit d’abord disparaître en tant que pays juif. Nous vivons dans deux pays différents. Le pays des dominants. Le pays des exploités. Je n’ai rien à céder, car nous n’avons rien. La terre, le pouvoir, les moyens sont aux Juifs. Israël a immigré chez moi. Israël, c’est mon chez moi. Avant d’être chez vous. »

Pour le présent, une étincelle d’espoir ?

« Non. »

La démocratie, la liberté d’expression, la Knesset, la médecine, la haute technologie, le soleil, notre rencontre ?

«Je n’ai rien à dire de bien sur Israël. »

Hanin Zoabi, palestinienne et israélienne, députée, parle avec conviction. Sans doute aucun. Le message est dur, le refus total, irrévocable. L’abîme, immense.

Cet article a été publié pour la première fois, dans mon livre, “En direct d’Israël”, paru aux éditions Inpress.

Israël – Portrait de femmes, Ofra Strauss

A l’entrée du bureau d’Ofra Strauss, au sommet d’une tour de la city de Ramat Gan, de beaux cadres de photos racontent l’histoire de la dynastie familiale.

Sur tout un pan de mur, sont exposés des encadrements de diverses dimensions, de couleurs vives et pastels, de bois sombre, dorés, argentés, de formes modernes et de style ancien. On y voit les débuts d’Israël, les grands parents fondateurs au regard fier, la première étable, les vieux tracteurs, la laiterie en noir et blanc, les parents, les enfants et les petits-enfants. Pour  l’héritière de l’un des fleurons de l’industrie israélienne, le succès s’inscrit intimement dans l’ancrage familial.

Dans les années 1930, des juifs, fuyant l’Allemagne nazie fondaient au bord de la Méditerranée, à quelques kilomètres de la frontière avec le Liban, la bourgade de Naharya. Dans une baraque face à la mer, Hilda, la grand-mère d’Ofra Strauss, fabriquait des fromages et des yaourts. Quelques décennies plus tard, la laiterie artisanale est devenue un empire industriel : des alliances stratégiques avec Danone, PepsiCo, Haier et le rachat d’Elite, autre société familiale, ont propulsé Strauss-Elite, ses yaourts, ses salades, ses chocolats et ses glaces à la tête de l’agroalimentaire israélien. En 1999, Michaël Strauss, le fils des fondateurs nomme sa fille aînée à la présidence du groupe. Depuis, avec 14.000 employés et un chiffre d’affaires de quelques deux milliards de dollars, l’entreprise présente dans dix-neuf pays, rayonne sur plusieurs continents.

Ofra Strauss est classée parmi les quinze femmes d’affaires les plus influentes du monde. Brune au teint blanc, brillante, riche, admirée, mère de quatre enfants, Strauss a une beauté ondoyante<

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Israël – Portrait de femmes, Ofra Strauss

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Une robe noire chic et minimaliste, un visage sans maquillage (« un choix philosophique »),  un mélange d’élégance, de naturel et de simplicité hautaine. Après une expérience de marketing chez l’Oréal à New York, elle gravit les échelons, seule, sous le regard exigeant de son père qui comprend vite que sa fille sera l’héritière. Elle a comme qualité première de choisir les bonnes alliances et les partenaires de qualité. Ofra Strauss est intuitive et workaholic, douze heures par jour au bureau n’est qu’une moyenne.

 

La naissance de la révolte sociale de l’été 2011 l’a passionné. Ses conseillers en communication hésitaient; elle a tranché et ouvert son bureau et même le jardin de sa maison aux « Indignés ». Ils exigeaient la baisse du prix du Milki, le célèbre yaourt au chocolat enrobé de crème onctueuse, le produit phare de Strauss. Elle s’intéressait à la philosophie de la révolte. Ses interlocuteurs n’ont pas été convaincus par la sincérité de la capitaliste et ont vite scandé « des gestes, pas des mots ». Ofra Strauss s’est faite plus discrète.

Elle reste pourtant le fer de lance de la responsabilité sociale de l’entreprise. Strauss parle avec fierté de “Yasmine”, un fond d’investissement, créé pour aider des femmes, juives et arabes, à développer des petites entreprises à succès. Présidence de Maalé, une organisation caritative qui regroupe les grands acteurs du monde des affaires, elle a convaincu: bien au-delà de l’effet “paillettes”, le ”Corporate Responsibility”  doit jouer un rôle innovant. Avec quelques autres patrons, elle a fait du bénévolat  une norme de l’entreprise  l’israélienne. En Israël, la  performance se mesure aussi aux actions sociales de l’entreprise.  Et à l’implication personnelle de son patron: lorsque que les tirs des raquettes du Hamas et du Hezbollah touchaient les zones périphériques, Ofra Strauss quittait chaque matin son bureau pour se rendre auprès des employés des usines du Nord et du Sud du pays.

“Les Trois femmes” racontent le combat de trois israéliennes: la juive orthodoxe Adina Bar Shalom, la militante Yifat Ovadia et la bédouine Ama Elsana Alh’juj, engagées, toutes trois, pour changer la réalité des femmes de leur communauté. En réalisant ce court-métrage épuré et sensible, Ofra Strauss a voulu transmettre un message. Figure emblématique de l’économie israélienne, elle prêche pour un pays divers, ouvert, tolérant, féminin, égalitaire, juste.

Impliquée aussi ces jours-ci dans le combat contre la violence infligée aux femmes, Ofra Strauss, sait pourtant que ces combats seront longs, durs et douloureux.

Cet article a été publié pour la première fois, dans mon livre, “En direct d’Israël”, paru aux éditions Inpress.

Les beignets de Hanoucca

 

En Israël, Hanoucca commence par des parfums.

Au début du mois de décembre, à l’approche de la fête de la Lumière, des effluves d’huile sucrée, de pâte levée, de chocolat fondant et de confiture rouge brûlante envahissent les rues de Jérusalem. Ces parfums vous happent et vous conduisent vers l’une des pâtisseries de la ville. Là, dans d’immenses marmites d’huile bouillante placées à même la rue, baignent des soufganiyot, ces gros beignets ronds de Hanoucca fourrés de confiture, de chocolat ou de sirop d’érable que le marchand saupoudre généreusement de sucre glace avant de vous tendre ces quelques centaines de calories dans un papier blanc.

Depuis quelques années, les beignets se sont fait oeuvres d’art. Véritables sculptures gastronomiques miniatures, beignets spectaculaires, jeux de texture, les beignets se métamorphosent en structure gourmande et ultra design, dans un chavirement de couleurs et d’arabesques, où rivalise le plaisir des yeux et des papilles.

Ce nouvel art culinaire de Hanoucca est même à l’origine de workshop où il faut s’inscrire dès l’été, pour découvrir l’art de créer un beignet art design.

Confiture rouge ou oeuvre d’art, cette gourmandise qui se cuit dans beaucoup, beaucoup, d’huile rappelle le miracle de la petite fiole d’huile qui alluma pendant huit jours les lumières du chandelier du Temple de Jérusalem. Lumière du candélabre, lumière de la résistance des Maccabées.

Pendant une semaine, Hanoucca, les lumières, les toupies, les parfums, les beignets ronds, les beignets colorés disent la fête des sens en Israël.

(Photo PR Roladin)